L'accord entre Nvidia et OpenAI soulève des inquiétudes sur des investissements "circulaires" dans l'IA

Nvidia est retombé de 2,8% hier soir à Wall Street, consolidant sur ses sommets au lendemain de l'annonce d'un deal incroyable avec OpenAI, partenariat stratégique majeur pour déployer 10 gigawatts de systèmes Nvidia. Ainsi, les deux partenaires ont annoncé une lettre d'intention pour un partenariat stratégique historique visant à déployer au moins 10 gigawatts de systèmes Nvidia pour l'infrastructure d'IA nouvelle génération d'OpenAI, afin d'entraîner et d'exécuter ses modèles de nouvelle génération, en vue du déploiement de la superintelligence. Pour soutenir ce déploiement, notamment en termes de capacité de centre de données et d'alimentation électrique, Nvidia prévoit d'investir jusqu'à 100 milliards de dollars dans OpenAI au fur et à mesure du déploiement des nouveaux systèmes.

Bloomberg revient pour sa part sur la question des investissements record dans l'IA impliquant en particulier le plus grand groupe au monde par la capitalisation boursière, Nvidia. Il faut dire qu'avec un deal à 100 milliards entre Nvidia et OpenAI, un autre de 300 milliards entre Oracle et ce même OpenAI, et un projet Stargate de 500 milliards de dollars - pour ne citer qu'eux -, la valse des deals pharaoniques entre acteurs de l'IA a de quoi interpeler. "Trois ans après qu'OpenAI et Nvidia Corp. ont contribué à lancer la frénésie mondiale de l'intelligence artificielle, les deux entreprises unissent leurs forces pour ouvrir la voie à une phase de développement plus coûteuse avec un accord qui a rapidement ravivé les craintes d'une bulle de l'IA", résume Bloomberg.

Nvidia a donc annoncé lundi un investissement pouvant atteindre 100 milliards de dollars dans OpenAI afin d'aider le fabricant de ChatGPT à soutenir le développement massif de centres de données équipés de ses puces. L'accord, selon certains analystes, soulève des questions quant au fait que Nvidia investisse massivement pour soutenir le marché et inciter les entreprises à investir dans ses propres produits. "Cette décision va clairement alimenter des inquiétudes circulaires", a écrit Stacy Rasgon, analyste chez Bernstein Research, dans une note dont certains éléments sont repris par Bloomberg. Ces inquiétudes ont accompagné Nvidia, à des degrés divers, pendant une grande partie de l'essor de l'IA, insiste l'agence. Le fabricant de puces a participé à plus de 50 investissements en capital-risque pour des entreprises du secteur en 2024, et est en passe de dépasser ces chiffres cette année, selon les données de PitchBook reprises par Bloomberg. Certaines de ces entreprises, parmi lesquelles des concepteurs de modèles d'IA et des fournisseurs de cloud, utilisent ensuite ce capital pour acquérir les processeurs graphiques coûteux de Nvidia.

Mais cette fois, l'ampleur de l'investissement dans OpenAI semble éclipser tous les autres, selon Rasgon, cité par Bloomberg. "Cet accord alimentera probablement ces inquiétudes bien plus que ce que nous avons observé précédemment et soulèvera (peut-être à juste titre) des questions quant à la logique de cette décision", a ajouté l'analyste. Nvidia a déclaré que l'investissement dans OpenAI ne servirait à aucun "achat direct" de produits Nvidia, rappelle tout de même l'analyste. Nvidia et OpenAI ont déclaré avant-hier que certains détails de l'accord étaient encore en cours de finalisation. Cependant, OpenAI prévoit de louer plutôt que d'acheter les processeurs d'IA à Nvidia, selon les dirigeants impliqués dans le projet, cités par Bloomberg. Ils ont également précisé qu'il était difficile de prédire le taux de dépréciation des puces d'IA. D'autres grandes entreprises technologiques, dont Microsoft et Amazon, ont également réalisé des investissements stratégiques dans des startups d'IA de premier plan afin de développer leurs offres de cloud computing.

"Nvidia occupe une place unique dans l'écosystème de l'IA en dominant le marché des puces avancées, essentielles à l'entraînement de modèles d'IA de pointe", rappelle Bloomberg. L'accord entre Nvidia et OpenAI intervient également dans un contexte d'incertitude pour le secteur, alors que de plus en plus d'acteurs reconnaissent le risque d'une bulle de l'IA, comparable à la bulle Internet. Le CEO d'OpenAI Sam Altman en personne a indiqué que les valorisations de certaines startups d'IA pourraient être irréalistes, même s'il affirme évidemment croire au potentiel à long terme de l'IA. "En se rapprochant de l'entreprise la plus valorisée au monde, OpenAI pourrait débloquer des financements et accéder à une capacité de calcul accrue, ce qu'elle ne peut actuellement obtenir seule en raison de ses pertes financières", résume Bloomberg. "C'est un peu comme si ses parents cosignaient son premier prêt immobilier", s'est amusé Jay Goldberg, analyste chez Seaport Global Securities, cité par Bloomberg, qui affiche une recommandation de vente sur Nvidia et juge lui aussi que l'accord Nvidia / OpenAI a des relents de financement circulaire et pourrait traduire un comportement de bulle.