Entretien avec Christopher Dembik, Conseiller en stratégie d'investissement chez Pictet AM
La Fed devrait baisser ses taux d'intérêt ce mois-ci...

Boursier.com : Faut-il redouter des secousses sur le marché français avec le probable départ du gouvernement Bayrou?
C.D. : La logique voudrait que les taux d'intérêt progressent après le 8 septembre et le départ du Premier ministre et du gouvernement, puis ils devraient se stabiliser, à l'image de ce qu'on a observé après la dissolution de juin 2024. Dans le même temps, des secousses semblent logiques sur les actions. Mais le risque d'une crise financière en France, synonyme de bien plus que des secousses, est faible. Les investisseurs étrangers sont attentifs à la situation politique mais achètent toujours de la dette française. Les investisseurs japonais, connus pour leur grande prudence, ont acheté de la dette française lors des dernières adjudications. Pour ce qui est de la hausse du taux à 10 ans français, de retour en ce début septembre, sur des niveaux de 2011, elle apparaît tout à fait cohérente avec l'incapacité du pays à faire face à son défi de désendettement. Mais à ce stade la demande en titres français est toujours là.
Boursier.com : Cette demande ne risque-t-elle pas de s'assécher ?
C.D. : En 2026, la France devra émettre 310 MdsE sur le marché obligataire, l'Allemagne 330 et l'Italie 350... On peut prendre l'hypothèse qu'à taux comparables, les investisseurs préfèreront l'Italie avec une trajectoire bien meilleure sur l'endettement. En outre, Fitch devrait, selon nous, abaisser sa note de crédit, le 12 septembre prochain, tout d'abord parce que l'agence avait placé la note sous perspective négative. Depuis, la situation budgétaire de la France ne s'est pas améliorée et Fitch n'a pas hésité à abaisser la note de certains pays européens ces derniers mois comme l'Autriche de AA+ à AA. Au-delà de la France, la demande en titres souverains, dont américains, devrait se maintenir, pour plusieurs raisons, dont celle des liquidités importantes à travers le monde. L'interventionnisme des banques centrales va se poursuivre. Autre élément important, nouveau dans le paysage : les stablecoins pourraient créer une demande en titres de dettes. En vertu de la loi Genius, les stablecoins sont tenus de détenir des bons du Trésor américain et la demande de stablecoins pourrait orienter les liquidités détenues dans des devises autres que le dollar vers les bons du Trésor américain.
Boursier.com : Qu'anticipez-vous pour le prochain rendez-vous de la Fed?
C.D. : La Fed devrait baisser ses taux d'intérêt ce mois-ci car le regain de pressions inflationnistes apparait comme transitoire, dans les services ou l'alimentaire. Jerome Powell a ouvert la voie à cet assouplissement lors du symposium de Jackson Hole.
Boursier.com : Le contexte apparait tout de même tendu pour se positionner sur les actions...
C.D. : Nous évoluons dans une phase de domination budgétaire, faite de stimulus budgétaires et monétaires de la part des gouvernements et des banques centrales. Les efforts de réduction de dépenses nous paraissent très difficiles à mettre en oeuvre dans les pays occidentaux. Ce facteur budgétaire s'avère structurellement favorable aux actions, permettant un accès des entreprises au crédit à moindre coût et favorisant la concentration de marché. Attention, à court terme, il peut apparaitre risqué de se positionner sur les actions, notamment en France, mais nous demeurons convaincus que cette classe d'actifs est incontournable sur longue période.
Boursier.com : Lesquelles?
C.D. : Les valeurs technologiques américaines demeurent incontournables. Il n'y a pas de sujet de surévaluation, hormis peut-être pour des titres comme Tesla et Palantir. Les "7 magnifiques" délivrent des performances remarquables et s'inscrivent sur des trajectoires de progression des bénéfices alléchantes : +145% depuis 2022, contre +4% pour le reste du S&P500... Cela devrait continuer car ces groupes évoluent sur des marchés oligopolistiques, notamment avec l'IA et savent capter les rentes, tout en innovant pour rester leaders. Elles possèdent énormément de cash, et procèdent à des rachats d'actions massifs : quasiment 1.000 milliards de Dollars attendus en la matière en 2025.
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