Le procès de l'ex-PDG de Casino Jean-Charles Naouri, jugé pour manipulation de cours, s'est ouvert

L'ancien PDG de Casino Jean-Charles Naouri comparaît depuis mercredi devant le tribunal correctionnel de Paris pour manipulation de cours et corruption, soupçonné d'avoir manœuvré pour maintenir artificiellement le prix de l'action de son entreprise en 2018 et 2019, ce qu'il conteste.
La société Casino Guichard Perrachon, qui a changé de mains en 2024, est également citée devant le tribunal pour manipulation de cours en bande organisée et corruption privée active.
"Le groupe a radicalement changé. Ce procès est le procès du passé", avait à la veille du procès commenté auprès de l'AFP un représentant de l'entreprise de grande distribution, tombée en 2024 dans l'escarcelle du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky au terme d'une restructuration spectaculaire de sa dette, devenue insoutenable.
Jean-Charles Naouri, premier actionnaire et patron du groupe pendant plusieurs décennies, l'avait en effet fait grossir à coup d'acquisitions financées par de l'endettement.
A la barre, l'ex-champion de la grande distribution a d'abord pris le temps de raconter son parcours - "Harvard", "ENA", "directeur de cabinet" de Pierre Bérégovoy - puis la success story de Casino, notamment lorsqu'il en a pris la direction générale à partir de 2005.
"Le groupe s'est beaucoup développé", avec "60% de parts de marché dans Paris", "30% sur la Côte d'Azur", des "éléments extrêmement positifs, perçus comme tels par nos concurrents", assure-t-il, en rappelant qu'"en 2015, Casino valait en Bourse plus de 10 milliards d'euros, c'est-à-dire plus de 100 euros par action".
"Un scénario fantastique"
Mais Casino était également sous le feu d'analystes financiers s'inquiétant de sa solvabilité et était pressé par les marchés de réduire son endettement.
Début septembre 2018, l'action Casino était tombée au plus bas jusqu'alors, autour de 25 euros.
"A l'époque, il y a une vraie inquiétude des investisseurs sur la soutenabilité de la dette du groupe", lui fait observer la présidente du tribunal correctionnel.
Au cours de leur enquête, les magistrats du Parquet national financier (PNF) avaient pointé une manipulation de cours "orchestrée par Casino" de septembre 2018 à juin 2019, ainsi que l'"intention frauduleuse des dirigeants et cadres de Casino ainsi que de Nicolas Miguet dans la diffusion de leur +feuilleton manipulatoire+".
Ce dernier, éditeur de presse, doit répondre de manipulation de cours en bande organisée, corruption privée passive, blanchiment de cette corruption et délit d'initié.
Sous couvert d'une convention de prestation de conseil d'environ 800.000 euros, M. Miguet aurait utilisé ses différents canaux de diffusion pour défendre le cours de bourse de l'entreprise, notamment auprès d'actionnaires individuels.
Ce, sans informer son public de ses liens financiers avec le groupe, selon le PNF.
"L'Autorité des marchés financiers a monté un cinéma, un scénario fantastique. La vérité va sortir, je l'espère, de ce procès", a fait valoir Nicolas Miguet en marge de l'audience.
Vente à découvert
Jean-Charles Naouri, qui conteste l'ensemble des faits, a toujours mis en avant "les attaques spéculatives virulentes" auxquelles le groupe a dû faire face durant cette période", rappellent ses avocats.
Lors de sa première prise de parole devant ses juges, il a immédiatement insisté sur une vaste opération menée en 2018 par "17 fonds" de ventes à découvert, destinée à faire baisser le cours de l'action.
Pour ses avocats, "ce contexte exceptionnel (...) a parfaitement justifié" que les dirigeants de Casino "aient souhaité que l'entreprise s'entoure de professionnels compétents dans leurs domaines respectifs", dans le but de "protéger tout simplement l'intérêt social du groupe".
Défendu par Mes Olivier Baratelli, Nicolas Huc-Morel, Francis Teitgen et Eric Laut, Jean-Charles Naouri réclame sa relaxe.
Trois anciens hauts cadres de l'entreprise sont également jugés pour les mêmes infractions. Parmi eux, l'ancien directeur de la communication comparaît en plus pour délit d'initié.
Alexandre Bompard, PDG du concurrent Carrefour depuis 2017, et Matthieu Pigasse, alors chez Lazard, banque qui conseillait Carrefour, ont été entendus en qualité de témoins au cours de l'enquête en octobre 2024, à la demande de la défense de Jean-Charles Naouri. Ils ont été interrogés sur une éventuelle tentative de rapprochement entre Carrefour et Casino en septembre 2018.
A cette période, Nicolas Miguet conseillait de vendre des titres Carrefour et d'acheter des titres Casino.
Le procès doit se tenir jusqu'au 22 octobre.
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